Que signifie réellement l’état d’urgence sanitaire ?
Présentation journalière de l'évolution de la pandémie

Que signifie réellement l’état d’urgence sanitaire ?

L’état d’urgence est une mesure prise par le gouvernement en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public ou à la sécurité de l’Etat, soit en cas d’événement qui, par leur nature et leur gravité, présentant le caractère de calamité publique. L’état d’urgence peut être ainsi déclaré en cas de crise, catastrophe naturel ou en cas de situation de guerre… par exemple. Depuis la constatation des premiers cas de contamination, le gouvernement a déclaré l’état d’urgence sanitaire le 21 mars 2020.
De façon générale et sans être exhaustif, le cadre légal de la lutte contre la COVID-19 est constitué des éléments suivants :

  • Constitution IVème République dans son article 61 ;
  • Loi n°91-011 du 18 juillet 1991 relative aux situations d’exception ;
  • Loi n°2011-002 du 15 juillet 2011 portant Code de la santé ;
  • Les éventuelles ordonnances légiférées dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, si existant ;
  • Décret n°2020-359 du 21 mars 2020 déclarant l’état d’urgence sanitaire sur tout le territoire de la République, et les décrets N° 2020 – 370 du 04 avril 2020, n°-2020– 420 du 17 avril 2020, N°2020-457 du 2 mai 2020, no 2020-483 du 16 Mai 2020, no 2020-592 du 30 mai 2020, n° 2020-610 du 13 Juin 2020, n° 2020-687 du 27 juin 2020 ainsi que le décret no 2020-748 du 11 Juillet 2020 prolongeant l’état d’urgence sanitaire sur tout le territoire de la République

Cadre stratégique de la lutte contre la COVID-19

En dehors du cadre juridique, il existe également un cadre stratégique. A ce titre, le gouvernement malgache a élaboré un Plan Multisectoriel d’Urgence Madagascar (PMDU) pour :

  • juguler la propagation du coronavirus et endiguer la pandémie ;
  • venir en aide aux populations vulnérables et répondre efficacement aux besoins vitaux de la population, aux défis de la réduction de la pauvreté, de la vulnérabilité et de la précarité ;
  • protéger l’économie, maintenir le capital humain et faciliter la relance.

La mise en œuvre du PMDU se décline ensuite à travers la Loi de Finances Rectificative 2020 même si en terme de chronologie, la LFR a été adoptée avant l’élaboration du PMDU. A ce titre, des incohérences peuvent subsister entre le plan et le budget 2020. L’analyse de la PLFR2020 a montré la non traçabilité des dépenses COVID-19 bien que les montants globaux soient annoncés dans le PMDU.

Que prévoient les textes en cas de situation d’urgence sanitaire ?

Que dit la Constitution ?

La Constitution dans son article 61 prévoit que le Président de la République peut proclamer l’état d’urgence sur tout ou partie du territoire de la République lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, son unité ou l’intégrité de son territoire sont menacées et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics se trouvent compromis.
Sans nous attarder sur la question de savoir si la situation actuelle à Madagascar remplit l’une des conditions prononcées par la Constitution, il importe de mettre en évidence que les critères d’appréciation de la gravité de la situation ne sont pas réellement quantifiés. Les statistiques actuelles ne permettent pas d’apprécier clairement la situation comme pouvant menacer l’intégrité du territoire, l’indépendance de la Nation, et encore moins compromettre le fonctionnement régulier des pouvoirs publics.

La Loi n° 91-011 du 18 juillet 1991 relative
aux situations d’exception et les décrets
de proclamation de l’état d’urgence

C’est au travers de l’article 13 de cette loi que l’on peut trouver une certaine clarification car celui-ci dispose que « La situation d’urgence peut être proclamée soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public ou à la sécurité de l’Etat, soit en cas d’événement qui, par leur nature et leur gravité, présentant le caractère de calamité publique. » La notion d’ordre public et le caractère de calamité publique sont les termes à retenir ici car la pandémie dans son stade le plus élevé constitue une réelle menace pour l’ordre public et pourrait, à l’instar de ce qui se passe dans les pays étrangers, devenir une véritable calamité publique.
En effet, dans le cadre de la situation d’urgence, on fait face à un régime d’exception à l’Etat de Droit. L’application et la jouissance des libertés publiques et droits fondamentaux des personnes sont strictement limités, les procédures administratives sont allégées et l’insécurité juridique est plus que jamais présente. L’inquiétude s’installe sur cette tendance à justifier par l’urgence les actes et décisions administratives, qui en temps normal ne relèvent pas de l’entité qui les a prises ou qui doivent être prise sous un autre cadre légal. Les principes d’intelligibilité, d’accessibilité et de transparence des normes et des décisions prises sont fortement compromis car de simples notes ou déclarations publiques d’un membre de l’exécutif suffisent pour écarter l’application de dispositions législatives claires.
En ce qui concerne les décrets de proclamation de l’état d’urgence sanitaire, ils manquent de précisions car ils ne définissent pas clairement les le mécanisme de gestion de l’état d’ urgence sanitaire, ils ne prévoient pas le rôle de chaque ministère ni des institutions nouvellement créées pour la gestion de cette crise et surtout leurs dispositions sont trop généralisées et imprécises.
Le PRM peut prolonger l’état d’urgence sanitaire tous les quinze jours par décret et ce sans aucune limitation dans le temps ni dans l’espace mais aussi et surtout sans aucune limitation juridique de cette faculté de prorogation. L’article 3 de la loi 91-011 dispose que : « La situation d’exception est limitée dans le temps. Elle peut toutefois être prolongée dans les mêmes formes, par périodes ne pouvant excéder chacune la période initiale. », c’est-à-dire que le Président décide en Conseil des ministres après avis des présidents de la HCC, de l’Assemblée nationale et du Sénat de proroger la situation d’exception, donc par un décret qui est un acte réglementaire. La même loi prévoit en son article 16 que « la durée de la situation d’urgence est de 15 jours »

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