Le 03 avril 2021, le Président de la République décrète de nouveau l’état d’urgence sanitaire, avec toutes les mesures qui s’ensuivent, sur le territoire de Madagascar, en raison de la recrudescence des cas positifs au COVID19 dans le pays. A travers le PMDU adopté en juillet 2020, l’Etat Malagasy a adopté comme cadre stratégique et opérationnel une politique pérenne, multisectorielle et surtout urgente pour mieux lutter contre la pandémie à Madagascar . Dans un précédent bulletin datant d’octobre 2020 intitulé « Pilotage et coordination de la lutte contre la pandémie à Madagascar », les organisations de la société civile membres du projet STEF ont effectué
des analyses sur le contenu et la mise en pratique de ce PMDU, aussi bien sur sa pertinence que sur sa structure, tout en apportant leurs recommandations. Depuis lors, la situation a évolué aussi bien en matière juridique qu’organisationnel et l’Etat malgache à travers le MEF a publié son rapport de gestion des fonds tel que prévu par l’article 8 du décret portant création du «Fonds de riposte à la pandémie Covid-19 ».
Retour à l’application de l’état d’urgence sanitaire
Sur le plan juridique, le fait le plus marquant a été le retour à l’application de l’état d’urgence sanitaire, ayant déjà été deux fois décrété le 3 et 17 avril ainsi que le 2 mai 2021 et justifié par une augmentation considérable du nombre de contaminations à Madagascar. Les points de droit et les problèmes juridiques soulevés par le projet STEF lors du précédent bulletin numéro2 reviennent de ce fait dans cet engrenage de cadre juridique dépassé et nécessitant plus que jamais une refonte pour mieux s’adapter à l’évolution du contexte
juridico-politique à Madagascar et afin de tenir compte au minimum des règles essentielles à la survie de l’Etat de Droit même en période de situation et d’état d’urgence sanitaire.
De nouveaux textes légaux sont venus complétés le dispositif légal de la lutte contre la COVID19, notamment en matière financière :
• Loi de Finances Rectificatives2020
• Loi de Finances Initiales 2021
• Décret n°2020-725 du 01er juillet 2020 portant création
d’un fonds de riposte COVID19
• Décret n°2020-1674 du 09 décembre 2020 portant création du compte de dépôt au niveau du Trésor
• Arrêté n°14-102/2020/MEF du 10 juillet 2020 portant
modalités d’exécution du décret 2020-725
• Note de Conseil du 17 mars 2021(marchés relatifs au COVID)
• Note de Conseil du 21 avril 2021
Les principales innovations concernent l’autorisation des dépenses COVID19 par le biais de 4 signatures dont celles du Président de la République, du Premier Ministre, du ministre de la Santé et du Ministre de l’Economie et des Finances, quel que soit le montant des dépenses.
CCO et ses démembrements non-opérationnels
Sur le plan organisationnel, entre la proclamation de l’état d’urgence sanitaire – le 21 mars 2020, et sa levée le 18 octobre 2020, le commandement opérationnel de la riposte contre le COVID19 a été mené par le CCO-COVID19 à Madagascar. C’était une structure présidée par le ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation, secondé par le ministre de la Santé et ayant regroupé des entités et acteurs directement impliqués dans la maitrise de la pandémie.
Sa mission a pris fin avec la levée de l’état d’urgence sanitaire le 18 octobre 2020.
Depuis lors, et jusqu’au rétablissement de l’état d’urgence sanitaire à Madagascar le 3 avril 2021, ce sont surtout les gouvernorats qui ont structuré au niveau de chaque région la riposte contre la pandémie selon leur situation respective et appuyés au niveau central par la Plateforme Nationale de Gestion Sanitaire du Covid 19 (PNGSC).
Cependant, depuis son adoption en tant que stratégie de riposte contre la pandémie à Madagascar, le PMDU a toujours été le document de référence et est toujours appliqué à titre de plan de contingence contre la pandémie à Madagascar.
La différence majeure pour cette seconde série d’état d’urgence sanitaire réside surtout dans le fait que le CCO-COVID19 et ses démembrements régionaux, qui regroupaient en un lieu physique les représentants des départements engagés dans la riposte immédiate (services de santé, d’hygiène, de sécurité publique, des transports, de l’éducation, de l’industrie, du commerce…), ne sont plus opérationnels alors que ceux-ci avaient été la clé de voute de la gestion opérationnelle de la pandémie lors de la première vague. Pourtant, l’un des axes stratégiques du PMDU est de renforcer la gouvernance de la lutte contre la pandémie à travers le renforcement des capacités et du financement des activités des CCO répartis sur l’ensemble du territoire, structures chargées de la mise en œuvre des activités de lutte contre la pandémie.
Création de la Plateforme Nationale de Gestion Sanitaire du Covid 19 (PNGSC).
Cette structure a été créée au début du mois de juillet 2020 pour travailler de concert avec le CCO et venir remplacer celui-ci par la suite. Il s’agit d’une plateforme digitale dirigée par le Ministre de
la Défense avec un Coordonnateur Général et composée d’une équipe médicale militaire et des membres du gouvernement. Sur le site de la Présidence de la République, on peut lire que «cette plateforme digitale, fruit de la collaboration entre plusieurs ministères, regroupe toutes les données médicales liées à la pandémie, en temps réel, grâce à l’utilisation du logiciel COVDATA.
La plateforme centralise les informations sur le nombre de lits disponibles dans tout le pays, le nombre de concentrateurs d’oxygène disponibles, le nombre de patients traités dans les hôpitaux et les centres de traitement ainsi que les patients mis en quarantaine ou en traitement à leur domicile.
La plateforme contribue également à orienter et prendre en charge
plus rapidement les patients. Par ailleurs, elle assure
aussi le suivi systématique des patients qui ont fait le choix de suivre leur traitement à leur domicile. »14
Réouverture et/ou mise en place de
nouveaux CTC

Mis à part les hôpitaux et les centres de soin classiques comme les CSB II ; l’Etat Malagasy a mis en place au niveau de chaque arrondissement de la Commune Urbaine d’Antananarivo, de ses périphéries et dans certaines régions les CTC ou Centre de Traitement Covid19 – pour faire face aux flambées de nouveaux cas positifs présentant des formes sévères de la maladie et nécessitant une hospitalisation – les CTC ou Centre de Traitement Covid19. Le manque d’infrastructures hospitalières et sanitaires a été à l’origine de la mise en place de ces CTC. Des établissements scolaires (comme l’Ecole Primaire Publique de Soamandrakizay ou le Lycée Technique d’Alarobia), des centres culturels (Palais des Sports et de la Culture Mahamasina) et même des hôtels privés ont été ainsi aménagés en centres de traitement de la pandémie. Dans le bulletin no3 mentionné auparavant, le projet
STEF avait émis quelques recommandations afin d’améliorer la gestion de la pandémie à Madagascar, tant au niveau de son efficacité qu’au niveau du respect de la transparence.
Si quelques propositions d’amélioration comme l’opérationnalisation des instances de mise en œuvre du PMDU ou la publication des rapports ont été appliquées ; force est de constater que de mauvaises
pratiques d’ordre organisationnel et de gouvernance
persistent et ne font que renforcer l’opacité de la gestion par l’Etat de la pandémie à Madagascar.

14 http://www.presidence.gov.mg/actualites/informations/sociale/1060-lutte-contre-le-covid-19-un-nouveau-ctc-et-une-plateforme-digitale-de-gestioncovid-19-sont-operationnels.html , 25/07/2020
Etat des lieux de l’application des recommandations dans le bulletin numéro 3
Dans le tableau récapitulatif ci-après figure l’état des lieux de l’application des recommandations du projet STEF :

Etat comparatif du Décret Fonds Covid et du Rapport MEF
L’article 8 du décret portant création du « Fonds de riposte à
la pandémie Covid-19 » prévoit l’établissement conjoint d’un
rapport financier par le régisseur, le comptable et l’ordonnateur
responsable de la gestion du fonds, un rapport qui doit être transmis au
Premier Ministre, aux PTF et faire l’objet d’une large diffusion par
la suite.
L’article 9 de ce décret prévoit une liste de ce que doit
contenir à minima ce rapport afin de respecter le droit à l’accès à
l’information, la transparence de la gestion des fonds ainsi que la
redevabilité de l’Etat. Cet article 9 mentionne que : « Le rapport
mensuel cité à l’article 8 doit notamment comporter :
- l’exécution technique (par activité) et financière (base engagement et paiement, selon les différentes nomenclatures dont la nomenclature fonctionnelle) ;
- la liste des donateurs nationaux et étrangers et celle des Partenaires
Techniques et Financiers ; - la nature, le volume et la valeur en terme monétaire des dons ;
- la liste des marchés publics attribués, leur nature, leur mode
de passation, leur montant, les titulaires du marché ; - la liste des bénéficiaires des allocations en numéraire, ou en
nature avec leurs coordonnées, et les prestataires ; - la liste des matériels et équipements acquis ainsi que leurs
attributaires ; - les prix d’acquisition avec leur justification et les procédés
et modalités appliquées pour les distributions, acquisitions et
prestations et les allocations des diverses indemnités et avantages
entrant dans le cadre de la lutte contre la pandémie Covid-19 »
Pourtant, après une analyse du rapport, il a été constaté que
certaines de ces rubriques ne figurent pas dans le document.
Ci-après un tableau présentant l’état des lieux de l’application de
cet article 9 au niveau de la forme
